Depuis son indépendance en 1943, le Liban a souvent subi l’influence de son grand voisin, la Syrie, que ce soit par des interventions militaires (en 1976 par exemple) ou l’installation de forces armées sur son territoire (de 1982 à 2000). Aujourd’hui, les regards du monde entier sont braqués sur la Syrie, observant avec angoisse la répression menée par le régime dictatorial de Bachar el-Assad. Le pays du Cèdre ne fait pas exception et constitue d’ailleurs l’une des destinations envisagées pour l’extraction de blessés de l’Armée de Libération Syrienne (ALS) ou de journalistes occidentaux menacés.
Rappelons d'abord que les combats qui opposent les forces armées aux insurgés ont fait près de huit mille morts à ce jour. Ils ne se sont interrompus que brièvement lors du référendum du dimanche 26 février où 89,4% des votants ont approuvé une nouvelle constitution qui est censée ouvrir la voie à un « pluralisme politique » sans toutefois remettre en question la mainmise du président sur les institutions. A Homs, bastion de l’insurrection assiégé par l'armée depuis maintenant près d’un mois, soixante huit personnes auraient été tuées lundi 27 février lors de bombardements et de tueries perpétrées par des milices civiles au service de Damas.
Le Hezbollah, allié traditionnel du régime syrien, est donc dans une position inconfortable : lui qui défend au Liban les droits d’une majorité chiite laissée pour compte, semble soutenir la minorité alaouite au pouvoir qui malmène le peuple syrien majoritairement sunnite et tente d’étouffer ses revendications dans le sang. En France, la presse généraliste traite régulièrement de la situation à Homs ou des tentatives de pressions internationales sur Bachar el-Assad mais reste au mieux allusive quant à la relation équivoque qui unit le parti chiite libanais à la Syrie. La plateforme de microblogging Twitter, en revanche, offre de vastes ressources sur la question, par le biais d’observateurs de tous horizons et de toutes nationalités qui transmettent ou relaient des informations qui leur semblent dignes d’intérêt. Sur la crise syrienne, les tweets sont innombrables. Après analyse, tous ces éléments nous livrent un panorama des différents enjeux que les utilisateurs de Twitter ont voulu mettre en avant.
Ils évoquent ainsi unanimement le rôle d’Hassan Nasrallah, le très médiatique secrétaire général du Hezbollah élu en 1992 dont les déclarations publiques constituent la seule source d’information quant à la position officielle du « parti de Dieu ». En décembre 2011, il critique fermement l'opposition syrienne, l’accusant d’être soumise aux États-Unis et à Israël. Mais dès le 8 février 2012, il tempère ses propos lors d’un discours télévisé. Toujours sceptique devant la médiatisation de la répression syrienne, Nasrallah critique le traitement qu’en font les medias : « You can see how the media works. They said Homs was on fire. […] We called friends in Homs – who have nothing to do with the regime – and they said nothing was going on in Homs. Just the usual. » Le secrétaire général du Hezbollah appelle ensuite à des pourparlers entre le gouvernement syrien et l’opposition. « Don’t set conditions for the dialogue. Don’t ask for the president to step down. Those who care about Syria should go to dialogue. » Nasrallah se pose ainsi en médiateur de la crise syrienne, dans une tentative de s’arroger un rôle régional qu’un internaute dénonce par un tweet : « Is Nasrallah satrap of Iran ? » Les satrapes étant les gouverneurs des satrapies – les provinces de l’ancien empire perse – Nasrallah ne serait-il pas le relais de l’Iran dans la région du Proche Orient stricto sensu ?
Ils évoquent ainsi unanimement le rôle d’Hassan Nasrallah, le très médiatique secrétaire général du Hezbollah élu en 1992 dont les déclarations publiques constituent la seule source d’information quant à la position officielle du « parti de Dieu ». En décembre 2011, il critique fermement l'opposition syrienne, l’accusant d’être soumise aux États-Unis et à Israël. Mais dès le 8 février 2012, il tempère ses propos lors d’un discours télévisé. Toujours sceptique devant la médiatisation de la répression syrienne, Nasrallah critique le traitement qu’en font les medias : « You can see how the media works. They said Homs was on fire. […] We called friends in Homs – who have nothing to do with the regime – and they said nothing was going on in Homs. Just the usual. » Le secrétaire général du Hezbollah appelle ensuite à des pourparlers entre le gouvernement syrien et l’opposition. « Don’t set conditions for the dialogue. Don’t ask for the president to step down. Those who care about Syria should go to dialogue. » Nasrallah se pose ainsi en médiateur de la crise syrienne, dans une tentative de s’arroger un rôle régional qu’un internaute dénonce par un tweet : « Is Nasrallah satrap of Iran ? » Les satrapes étant les gouverneurs des satrapies – les provinces de l’ancien empire perse – Nasrallah ne serait-il pas le relais de l’Iran dans la région du Proche Orient stricto sensu ?
Reuters, 8 février 2012 - Hassan Nasrallah appelle au
dialogue entre le régime et les insurgés syriens.
Il est en tout cas considéré comme tel par les acteurs régionaux, qui accordent au Hezbollah et à son leader une importance considérable. C’est l’objet de nombreux tweets du 27 février, qui relèvent notamment la déclaration de Burhan Ghalioun, le président du Conseil National Syrien (CNS) [regroupant les principaux courants de l’opposition, ndb]. Au cours de son intervention, M. Ghalioun a convié le Hezbollah à se ranger aux côtés de l’insurrection syrienne, l’assurant qu’« en politique, il n’y a pas d’alliances éternelles » et que le CNS ne « [sacrifieraient] pas le Hezbollah si ce dernier [décidait] de soutenir la quête du peuple syrien vers la démocratie et la liberté ». Comprenez qu’en cas de changement d’allégeance, le CNS ne tiendrait pas rigueur au « parti de Dieu » de sa fidélité passée au régime de Bachar el-Assad.
La twittosphère est également préoccupée par la réaction d’Israël face à cette situation. Selon Nasrallah, « les Israéliens ont vu une opportunité dans la crise en Syrie [et] misent sur la chute du président syrien Bachar el-Assad [pour] changer les règles du jeu dans la région. » Le leader du Hezbollah persiste dans sa méfiance vis-à-vis de ce qu’il appelle « l’ennemi sioniste », mais les twitternautes indiquent qu’Israël voit cette histoire d’une toute autre manière. Ainsi l’un d’eux twitte-t-il le 23 février : « Il a été craint qu’Assad tente de positionner son arsenal de missiles et d’armes chimiques auprès du Hezbollah au Liban ». Le ministre de la défense israélien a en effet révélé dès le 9 février que l’Etat d’Israël était conscient de la possibilité d’un « transfert d’armes syriennes sophistiquées au Hezbollah » lors de la chute du régime syrien et s'employait activement à empêcher un tel dénouement.
Jusque là, Twitter nous a offert des informations précieuses mais colporte parfois aussi des rumeurs infondées. Notamment celle qui affirme que le Hezbollah attaquerait Israël si les puissances occidentales s’impliquaient en Syrie. Le 5 février, c’est en effet ce qu’a annoncé un « officiel libanais du Hezbollah », selon le site web d’information Palestinian News Network. Depuis, cette information n’a pu être confirmée par aucun média israélien, ni d’ailleurs par aucun responsable hezbollahi.
Enfin, une petite touche people s’il en est : les twitternautes ont relayé avec enthousiasme la publication de la célèbre actrice syrienne May Skaf, qui accuse Hassan Nasrallah de soutenir Bachar el-Assad au détriment du peuple syrien : « Je veux dire à Hassan Nasrallah qu'il retire ses "chabbiha" [milices] de Syrie ». L’hypothèse que des combattants du Hezbollah se soient joints aux forces armées du régime syrien était régulièrement émise par les insurgés sans qu’elle ait été vérifiée pour l’instant. Émise par l’actrice, elle a eu le mérite de déclencher une polémique et un vrai questionnement.
Article publié dans la revue Strabismes, de l'association Regards Croisés, édition de mars 2012.
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